L’Art de vivre à la française
222 rue Saint-Denis, au beau milieu des ateliers de tissus qui faisaient la renommée de ce quartier ouvrier dans les années 70, l’enseigne champêtre « Dubillot » a fière allure. Elle est surmontée par 6m2 de fresque en mosaïque style iconographie à la Alphonse de Muchat qui trône au-dessus de la terrasse. Stupéfiant. L’artisanat français dans toute sa splendeur qui sort d’un atelier d’artiste du 12ème arrondissement. Sur les portes, deux « à table ! » fièrement sérigraphiés à la feuille d’or laissent présager la suite. Dubillot apparait dès l’entrée, mosaïque folklo sous les pieds, comme étant un haut-lieu des Années Folles.
A peine passé le pas de la porte on fait face à un bar en marbre rose au charme entêtant. Pour complaire l’ensemble, comptoir en chêne naturel et faïence émaillée qu’on croirait venir tout droit d’une officine du début du XXème siècle. À droite, on se glisse dans l’une des quatre banquettes façon diner en cuir orangé depuis lesquelles on mate les cuistots s’affairer en cuisine. Au-dessus des têtes : étagères en serrurerie suspendues pleine à craquer de vaisselle vintage, déco désuète et bocaux pickles en guise d’arrière-boutique pour la cuisine qui vient se servir directement sur ces étals. À gauche, banquette arrondie en velours rouge tradi-sexy de brasserie et tables en marbre blanc. Les architectes de B3 Designers et de Dorénavant Studio n’ont rien laissé au hasard.
L’étage rivalise de beauté avec le rez-de-chaussée. À mi-chemin, on tombe nez-à-nez avec une immense et électrisante arcade de bouteilles. On déboule sur un palier en parquet massif dans une pose Versailles revisitée, pleine vue sur la verrière en vitrail cathédrale aux tons chamarrés ; les yeux rivés, aussi, sur un second bar duquel partira pléthore d’assiettes de charcut’ fraîchement tranchée.
Le lieu continue de dérouler des ambiances tantôt populo, tantôt intimistes. Derrière ce pan vertigineux de spiritueux, un arbre qui grimpe jusqu’au plafond accueille tout autour de lui une dizaine de ripailleurs. En toile de fond, les tapisseries murales bardées de cadres d’époque, affiches anciennes et portraits de famille rendent l’atmosphère exquisément feutrée.
Dernier stop, plutôt burlesque cette fois-ci, les toilettes installées dans les caves voûtées du Paris d’autrefois qui renferment une ambiance maison close curieuse et singulière. Voyez-là une référence historique au quartier : ici siégeait il y a 150 ans un célèbre bordel.
Du fait maison 100% français
Cela va sans dire, tout est mitonné maison par Thibaut Darteyre, Baptiste Swygart et leur brigade, c’est-à-dire sur place à partir de produits bruts uniquement. Des produits 100% français, chinés en circuit court ou en direct producteur autant que faire se peut : salaisons du Périgord, agneau du Bourbonnais, saucisse aveyronnaise… De la viande, oui, mais de qualité, et sans jamais y couper.
D’abord, il y a l’apéro. Et pour l’apéro, la maison envoie une charcut’ maison qui déboite. Finger de tête de veau à la française, terrine de campagne et rillettes de volaille. Puis, de toute évidence, ineffable héritage de la vitrine des charcutiers, un sacré pâté en croûte dont il faut expressément se payer une tranche : pâte bien beurrée du pâtissier, gelée au porto, pistaches et coeur fois gras.
On peut aussi se flanquer une poignée de trouvailles à partager, des pépites artisanales de chez artisanales chinées aux quatre coins de la France. Ici, la cuisine puise fort dans le terroir, sans esbroufe. Jambon Ibaima (rarissime jambon sec dont seules 3 maisons se partagent la savante confection ), Jésus de Pierre préparé au coeur des Aldudes, truite fumée des Pyrénées pêchée au pied des sommets d’Argelès, etc.
À la carte, des entrées et des plats réconfortants qui font la part belle à notre fascinant patrimoine culinaire français. Voyez donc : poireaux vinaigrette braisés, croûtons et noisettes torréfiées , tartare de Salers et frites allumettes, saucisse aveyronnaise au couteau braisée, jus de viande mijoté 8h et purée au beurre de baratte… Tout ça servi par une flotte de serveurs réjouissants et ultra souriants qui rendent l’ambiance délectable et bon enfant.
Pour les non carnivores, il y a toujours la pêche du jour en direct de nos plages Bretonnes ou le veggie du moment, une aubergine farcie qui sent bon l’été, et qui donne irrépressiblement envie de soleil et de farniente.
La cuisine au charbon de bois
Si le lieu pousse tant à la frénésie, c’est grâce à la cuisine au charbon de bois qui officie derrière les fourneaux, et qui répand allègrement ses divines effluves. Le barbecue de Dubillot s’impose sans crier gare comme l’une des pièces maitresses de la maison. À tester absolument, la côte de boeuf de Salers à la braise, bien maturée, servie avec un généreux gratin dauphinois dans un plat en fonte. L’épaule d’agneau, confite toute une nuit durant puis rôtie à la braise comme les grands-pères savent le faire, est elle aussi à se damner.
Pour finir, on s’arrêtera volontiers sur la carte des desserts, véritable Madeleine de Proust à elle seule, que l’on doit au chef pâtissier Clément Le Cam. Dispatchés ici et là derrière les nombreuses vitrines rétro, on reluque avec envie les parts de tarte de mamie, le mille-feuille bien régressif ou encore le riz au lait archi-crémeux. Exception faite aux grandes tablées, où les desserts pourront être servis version XXL, y compris pour l’incontournable Paris-Brest qu’on ne présente plus.
En quelques mots, la Brasserie Dubillot est une belle brasserie parisienne qu’il faut tester !
Informations Pratiques
Brasserie Dubillot
222 Rue Saint-Denis
75002 Paris – Île de France
Crédits photo : @Nodietclub
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