Il était une fois LIPP…
Quelle est la signature de Lipp, la plus chic des brasseries de la rive gauche ? Une mise en scène inchangée qui accueille des silhouettes à la mode et des personnalités dans l’air du temps depuis plus de 130 ans… Tel est l’esprit de cette brasserie unique en son genre dont l’atmosphère personnifie si bien Paris, à la fois intellectuelle et mondaine, futile et spirituelle, anachronique et tellement contemporaine. Un supplément d’âme qui ne se raconte pas, il se vit !
Garçon !
19 ans ! C’est la moyenne d’ancienneté du personnel. Travail au plateau, fluidité parfaite, le jeu des serveurs évoque une danse millimétrée. On embrasse les garçons comme du bon pain, on leur demande des nouvelles de leur progéniture. Ces hommes sont l’âme de la maison.
Fait exceptionnel : “On ne quitte pas (ou presque) Lipp : on part à la retraite”, comme l’explique Claude Guittard, directeur de la maison qui commença lui-même… comme chef de rang ! Quant aux “garçons”, ils le sont encore tous, fidèlement à la clause du bail de 1880 qui exigeaient des Lipp que les serveurs soient des hommes pour endiguer la vague d’alcoolisme chez les jeunes femmes serveuses…
Un menu certifié vintage
Chez Lipp, on ne surfe pas sur les modes éphémères et on ne cède jamais aux sirènes de la branchitude… Surtout quand il s’agit de nourritures terrestres.
A la carte : l’éventail d’avocats crevettes flirte encore et toujours avec les poireaux vinaigrettes, les harengs Bismarck, les couteaux en persillade, les pieds de porcs farcis et son inénarrable purée maison, le fameux gigot-mayo, sans oublier les rognons de veau sauce moutarde ou le (plus que) parfait au café…
Voilà 60 ans que Lipp affiche les mêmes plats cultes. Preuve en est : le modèle du menu est déposé depuis plus d’un demi-siècle… Pas question d’en changer une ligne.
Les générations se succèdent, les assiettes et le service “au plat” restent inchangés depuis six décennies, à l’instar du semainier !
Choucroute Star
Depuis 1880, la choucroute est à la carte ! Aujourd’hui encore, par pluie ou canicule, du 1er janvier au 14 juillet, elle reste la plus populaire de la brasserie avec 15 tonnes de choux commandés par an !
Name-dropping à la carte
Pouvait-il en être autrement ? Chez Lipp, on aime les VIP : Very Important Producteurs! Autrement dit, les fournisseurs les plus en vogue de la capitale sont réunis sur la même carte pour satisfaire les appétits d’une clientèle délicieusement exigeante.
Caviar, saumon fumé et tarama sont livrés par une autre grande institution parisienne : Petrossian. Pour tenir la promesse d’huîtres de haute volée, l’ostréiculteur ultra-prisé Joël Dupuch, assure la marée. Tout est bon dans le cochon : le jambon d’Auvergne débarque tout droit de la Maison Conquet, le persillé est sourcé chez Gilles Vérot, sans oublier l’assiette Prince de Paris, dernier artisan parigot à produire le “vrai jambon de Paris” en direct de la rue de Charonne, également fournisseur de tous les chefs étoilés… Pour ravir les becs sucrés : un Mont Blanc signé Angelina ou le Fontainebleau signature de Marie Quatrehomme, la fromagère voisine et Meilleure Ouvrier de France.
Un décor inchangé
Nettoyé, mais jamais restauré ! Chez Lipp, les traditions ont la vie dure. Depuis les années 20, la scénographie reste exactement la même. Porte tambour, banquettes Moleskine, houblon en fleurs sur les murs, céramiques de Léon Fargues, plafonds peints par Charly Garrey… La disposition est restée la même.
Être vu et se faire voir
Paradis, purgatoire, enfer… C’est ainsi que les différents recoins de la chapelle mondaine qu’est Lipp ont été baptisés par ses snobs habitués. Pour mieux comprendre ce jargon : sachez que la banquette à droite à l’entrée n’est autre que le séjour céleste où l’on installe les chics privilégiés : Jean-Pierre Elkabbach, Belmondo, Vincent Lindon ou Kate Moss pour ne citer qu’eux… En revanche, être placé au premier étage relève pour certains de l’affront social. C’est là qu’on retrouve le plus souvent les touristes et les sales gosses…
Table non-officielle des députés entre deux sessions parlementaires ou quartier général des mannequins qui comptent pendant la fashion-week couture… Oui, Lipp est un théâtre parisien, une salle à manger mondaine où les chics anonymes du quartier côtoient depuis toujours le gratin parisien, l’establishment politique, les oiseaux de nuits canaille, les journalistes influents, les figures littéraires, PDG, avocats médiatiques et stars hollywoodiennes. De Verlaine à Beigbeder, Françoise Sagan à Kate Moss, François Mitterrand à Emmanuel Macron sans oublier, Charlotte Gainsbourg, Chiara Mastroianni, Scarlett Johansson, Sophie Marceau, Sofia Coppola ou encore les nouvelles brindilles comme Lilli Rose Depp, Chiara Delevigne, Emilie Ratachovsky et tant d’autres: le bottin mondain n’y suffirait pas ! Tout le beau monde a ses habitudes chez Lipp…
Jeu de miroir !
Singularité de la brasserie : les miroirs de Lipp sont penchés de 10°… Un détail terriblement snob qui permet aux clients dos à la porte de scruter dans la glace qui entre sans avoir à se retourner…
Un prix littéraire pas comme les autres
Lipp, c’est aussi un prix littéraire depuis 1935… Tradition oblige : la brasserie la plus célèbre de la rive gauche récompense chaque année un roman. Singularité germanopratine : le Prix Cazes sort du lot de la rentrée littéraire traditionnellement célébré en septembre… Et décerne son prix en mars ! Son projet : privilégier les écrivains de langue française n’ayant jamais été distingués, dans l’ambition de révéler des plumes prometteuses. Pour ne citer qu’elles : Olivier Todd, Nicolas d’Estienne D’orves,
les dates clés de la brasserie LIPP
- 1880 : Léonard et Pétronille Lipp quittent l’Alsace pour ouvrir leur première brasserie à Saint Germain des Prés.
- 1920 : Marcellin Cazes reprend Lipp.
- 1924 : Hemingway fréquente Lipp et y écrit des passages de “Paris est une fête”.
- 1925 : Marcellin Cazes inaugure la salle du fond.
- 1928 : A son arrivée en France après sa traversée de l’Atlantique, Charles Lindbergh exige de se rendre à Saint Germain des Prés. La brasserie passe la plus longue nuit de son histoire et sert 24h sans interruptions.
- 1935 : Lancement du Prix Cazes, un événement littéraire et mondain destiné à récompenser un jeune écrivain prometteur.
- 1944 : Lipp sort un menu maigre à base de carottes Vichy.
- 1960 : Chloé organise son défilé Printemps-Été chez Lipp qui réunit tout le gotha de la mode.
- 1965 : Mehdi Ben Barka se fait arrêter devant la porte de la Brasserie.
- 1974 : Mitterrand apprenant la mort soudaine de Pompidou, part sans régler son addition. Au patron: il crie “Envoyez la note à l’Elysée. Il y sera élu 7 ans plus tard et continuera de s’attabler chez Lipp pendant toute sa présidence.
- 2002 : Olivier Bertrand reprend la brasserie Lipp et exige du directeur Claude Guittard “ de ne surtout rien changer”.
- 2010 : Lipp fête ses 130 ans.
Informations Pratiques
Brasserie Lipp
151, boulevard Saint-Germain
75006 Paris
Tél : 01 45 48 53 91
Site Internet : www.brasserielipp.fr
Ouvert non-stop 7 jours sur 7 de 11h à 1h Fermeture le 25 décembre.
Crédits photo : Brasserie Lipp
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